L’idée de départ était « simple » : raconter une histoire en utilisant la matière que pouvait nous offrir un voyage de 8 jours dans la ville de Québec où nous avions deux concerts programmés, utiliser la musique de ZATO pour illustrer cette histoire, développer le travail cinématographique avec nos vidéastes préférés (Benjamin Chagneux et Frankie Doguet), travail déjà amorcé lors de la réalisation de nos clips Children of Hell et Dancin’. Après, il ne nous restait plus qu’à matérialiser ces idées: Do It Yourself!
L’équipe, enrichie de la présence de Natacha Rault (son) et Robin Genetier (régie) s’est donc donnée rendez vous un dimanche matin d’avril à la gare de Mâcon direction Lyon afin d’attraper un TGV direct pour Roissy. A partir de là, l’aventure « Black is the light » peut réellement commencer!
10 kg de bagages en cabine plus 23 en soute par personne , ça semble beaucoup mais finalement avec les guitares, le violon, les pédaliers, le matériel vidéo et quelques pulls (le temps annoncé étant … exécrable pour un printemps canadien !), nous ne sommes pas si larges que cela.
Après 8 mois de préparation, nous voilà enfin dans l’avion, avec l’excitation de bientôt toucher le sol canadien … et une certaine appréhension devant l’énorme job qui nous attend là-bas. Surtout, surtout, que l’on puisse éviter la grosse galère qui remettrait vite en question cette seule semaine, trop courte pour pouvoir se retourner.
Victoire! Les terres des cousins sont en vue… et vu du haut, il reste de la neige :-)…
On arrive un dimanche en début d’après-midi après être partis …. en début d’après-midi: 6 heures de jetlag qui vont nous poursuivre jusqu’au samedi suivant, dur, dur!
Il tombe des trombes d’eau à Montréal et pour l’instant on ne voit pas grand chose du paysage tellement c’est le déluge. Le temps de récupérer notre carrosse magique, et hop on entasse tout le monde et le matos: Robin nous drive jusqu’à Québec (il connaît très bien la ville et on peut dire qu’on a eu un guide d’exception durant cette semaine). Je récupère un ampli (merci JP Couët!) pour pouvoir répéter les nouveaux morceaux qu’on doit enregistrer le samedi suivant à l’Ampli, notre partenaire à Québec .
On arrive vers 23 heures locales (5 h du mat’ j’ai des frissons) à Château Richer, pas loin des chutes de Montmorency. La maison est impossible à ouvrir, système de clé programmable introuvable… Si près du but, on se gèle dehors. On finit par ouvrir la première porte …derrière laquelle se trouve la vraie porte d’entrée. Bah oui mon loulou, t’es au Canada, et ici les baraques, elles ont deux portes pour lutter contre les éléments un peu violents. La maison, en vrai dans le soleil, elle est comme ça:
Dodo . Lundi: Réveil à 3 heures (9 h dans nos petites têtes…). Pas top. Du coup, on se brûle une petite sucette à l’érable à 7h, il faut dire qu’il n y a rien d’autre à se mettre sous la dent. On la trempe dans notre thé pour diluer l’ impression de sucre. Tout le monde s’y met.
Il faut prendre le positif: on va pouvoir commencer à bosser tôt. Mais première mauvaise nouvelle : le gars qui devait faire l’acteur avec nous sur la « grosse » scène du film déclare forfait . Super. Tournage prévu le samedi suivant, cela nous laisse quelques jours pour trouver son remplaçant. Inch’ Allah. On commence à envisager d’autres possibilités.
Première journée consacrée aux courses, au repérage des lieux et à la première scène tournée à l’aéroport (presque désert) de Québec!
Wild… Pas d’autorisation, pas de contrat (ça coûte une blinde la journée d’utilisation du site) alors on se prépare à l’avance, caméras, perche, fringues, et en avant Guingamp! Robin démine la sécu, occupe le terrain, se fait pourrir par le dircom de l’aéroport, on se fait traiter de français quoi. Mais on tourne pendant tout le bazar :-), et on obtient les premières images du film , magique !
De retour à la maison, on commence nos deux jours de tournage@home,comme prévu .
Les deux premières journées de tournage se passent bien, on prend confiance , les numéros de plans commencent à défiler, chacun prend ses marques. Une seule idée en tête : être efficace et bétonner, au cas où on ait à faire à des impondérables.
On est tellement détendus que le soir, on discute politique, c’est facile, on est entre nous, plus ou moins du même bord, on peut refaire le monde à notre guise et y croire, c’est nous les plus forts, on ne sait pas encore que sept millions sept de français voteront Marine Le Pen au premier tour.
Mercredi: Cela fait deux jours que nous n’avons quasiment pas décollé du chalet. Mais aujourd’hui, on va voir le Monde et se reconnecter avec l’extérieur. Premier passage à l’Ampli: on retrouve Eric qui était venu à la Cavazik cette automne, et Guillaume Lwazo, un de ses collègues, colosse hyper tatoué à la voix de stentor. On dirait qu’il est tout droit sorti d’un film de Tarantino.
On enchaîne cette journée avec un premier concert à l’Antibar, un gros pub où passent 4 groupes par semaine. On joue avec deux autres groupes québécois, Eléphantôme et Garnotte. Eux, ils chantent en français, comme une grande partie des groupes ici qui défendent cette langue sur ce continent américain où l’anglais est roi.
Bon, à l’Antibar, il y a des très bonnes bières, comme partout à Québec…mais on ne va pas non plus abuser. Car en plus du concert, on a prévu de tourner une scène en intérieur et en extérieur. Malheureusement, il pleut (encore), alors ce sera niet pour l’extérieur… et niet pour l’intérieur aussi car ici, première surprise pour les oreilles, tu oublies les limitations de niveau de son. C’est free. Liberté, liberté chérie. J’écris ton nom. Avec un son pareil, impossible de tourner la scène en intérieur, et puis l’éclairage est trop juste. Bon bon bon, ça n’arrange pas nos affaires. On mange chez Gaston , le burger du coin … (et oui t’es pas à la Cave à musique là, t’oublies aussi les petits repas préparés avec amour). Je crois que c’est ce soir là que Frankie a dégusté la première poutine d’une longue série . Et puis on revient, hop on est sur scène, pour 30 minutes de show comme ils disent ici. Malgré le public chaud et réceptif, on regagne les loges assez déprimés. 2 morceaux pour se mettre dedans, deux morceaux où on commence à se sentir bien, deux morceaux à fond et hop c’est fini. Trois p’tits tours et puis s’en vont, au revoir Messieurs-dames. Alors après le concert, premier coup de mou dû à la fatigue qui commence à pointer son vilain nez. Natacha est déçue aussi, elle a souffert ce soir, elle qui avait la responsabilité du son live, de l’enregistrement multi-piste du concert, sur un système qu’elle ne connaissait pas et dans le grand speed d’un concert à trois groupes avec une courte balance. Mais comme dit Robin, « une fois que le match est joué, il est joué, ça ne sert à rien de revenir dessus. » Avec Kermite on décide de plier et on rentre à la maison tourner une scène « calme » au terme de laquelle Céline/Anna s’endormira pour de bon, tête sur l’oreiller. Ce sera la bonne prise, l’Actor’s studio n’a qu’à bien se tenir.
Jeudi, 6 heures du mat, révélation. » Mais oui mais c’est bien sûr! » « – Quoi? » » Je sais à qui on va demander pour la scène de l’ange. On va demander à Guillaume. » Guillaume, Guillaume, vous vous rappelez? Le mec tout droit sorti d’un film de Tarantino. Il ne reste plus qu’à le convaincre. En attendant, jeudi est une grosse journée, 2 radios de prévu, un concert dans une librairie, et bien sûr du tournage. Comme j’ai toujours des bonnes idées, je décide fort intelligemment de déplacer une pédale d’un de mes pédaliers en sectionnant son attache avec un ouvre-boite dégoté dans un tiroir de la cuisine, le tout dans le coffre même de la voiture. Bref je ripe et c’est mon pouce qui s’ouvre magnifiquement sur 4 cm. Banco. Enroulage de PQ autour du pouce et c’est parti pour la première radio: arrivée 2 minutes avant le début de l’émission pour jouer un morceau. On commence et mon pouce saigne, j’en mets partout, c’est la joie, une joie un peu gore, la présentatrice a un regard bizarre. Elle s’appelle Julie et son émission est super. Elle me file du film plastique en attendant mieux. Séquence radio sur le vif!
On a un peu de temps avant de repasser à l’Ampli pour tenter de convaincre Guillaume. On se balade un peu. Chose inouïe, je participe au shopping, j’ai même ramené un tee shirt de hockey pour mon gamin.
Retour à l’Ampli. Guillaume se laisse convaincre. On est content, content, content. Vraiment content. Si j’étais plus souple, j’aurais pu sauter de joie. Every cloud has a silver lining.
J’ai toujours mal au pouce, Robin appelle la deuxième radio , on ne jouera plus avant le concert de ce soir, le temps que je mette des straps. Heureusement l’émission est vraiment bien, on peut causer du projet à fond et on passe un bon moment avec Jessica.
Podcast de l’émission:
On enchaîne sur notre deuxième concert à la Librairie St Jean Baptiste, tenue par le très sympathique et libre penseur Stéphane Robitaille et là ça nous redonne du baume au coeur. Le lieu est magnifique , l’accueil chaleureux, parfait pour tourner encore une scène. Le concert se passe bien, on est plus à l’aise qu’à l’Anti où nous étions trop dans le speed. Est-ce qu’on est obligés de dire qu’il y avait très très peu de spectateurs?
On rentre @home, on bosse encore, nouvelle scène. Fatigue. Grosse fatigue . Le salon où on doit tourner ne répond pas à nos exigences de prises de vue, on pinaille, et on finit tard , 1h30 locale soit … 7-30 heure française… A ce stade de la semaine, on ne sait plus tellement où se situent jour et nuit: on bosse, et on se repose quand on ne bosse pas.
Vendredi: on rame encore à s’organiser devant la météo alternant soleil, pluie intense, froid sévère. Et ça influe sur le relationnel ;-), chacun doit mettre du sien pour que le projet puisse se faire, malgré tous les tracas. On réussit malgré tout à bosser toute la journée, en intérieur, et en extérieur, dans un pub fort sympathique et archi-bondé où notre tournage sauvage passe quasi inaperçu … Une serveuse me demande si on vient tourner, je dis oui avec le sourire. Elle semble interloquée, je lui assure qu’on sera discret « as possible », des clients normaux, juste avec une caméra… Encore faut-il trouver une place. Mais ce jour là, la chance est avec nous, « elle sourit aux audacieux » dit-on: on dégote moins de 3 minutes plus tard une table où tout installer, dans un angle bien éclairé, on commande des pintes et c’est parti . Action, ça tourne. Le moral remonte . 🙂 Nat’ passe de l’autre côté du miroir et endosse avec grand naturel le rôle de la copine d’Anna. On se marre bien.
Tournage encore jusqu’au soir. On essaie de se coucher tôt, enfin relativement, car demain pour Zato c’est studio toute la journée, et le challenge est important, il s’agit de ramener le plus de nouvelles compos de Québec pour illustrer le film.
Samedi: On arrive à 9h30 au studio, accueillis fort chaleureusement par Sylvain Dominic, l’ingé son de l’Ampli. On choisit un grand local ou le violon sonne joliment. Je cale mon ampli canadien très gentiment prêté par Guillaume Lwazo (qui oeuvre comme bassiste, chanteur ou gratteux dans les Indiens, Gaz et avec Val Thomas) dans un autre local adjacent, c’est un gros titi canadien des 70’s à lampes et il dégage bien les bronches. Natacha s’active avec Stéphane, au stud, à la console, tout est calé très vite. Quand je vois nos têtes sur les photos, ça me laisse rêveur encore sur notre état…
Le violon nous donne hélas du fil à retordre, le capteur Schertler n’a pas aimé du tout les changements hydrométriques et la clim de l’avion … Céline ne peut utiliser ses effets et sa cellule, ça l’énerve. Problème supplémentaire de jack capricieux, puis de connecteur… la totale. On s’engueule un peu, la fatigue ressort, et on sait que tout reste à faire pour la musique.
Mais voilà Zato joue , la musique arrive, alors c’est parti, on rentre dans notre bulle et rien ne peut nous arrêter. Enfin, si quand même, l’heure: à 16 heures, 5 morceaux sont dans la boîte. Je retrouve Frankie et Kermite qui pioncent à la cafète… leur après-midi québécois de tournage d’images d’illustration s’est mal passé, le temps est trop pourri , il fait très froid. Autant se reposer. Ou aller voir des concerts comme Robin qui a écouté un chouette groupe apparemment cet après midi là.
Je me prends le coup de barre du siècle , cette journée m’achève, les 6 heures de chant n’y sont sûrement pas pour rien… Je me sens soulagé aussi, on pourra surement utiliser du son de Québec et c’était un des buts importants du projet.
Enfin on va connaitre notre première vraie pause, puisqu’on est invité par Eric et Guillaume de l’Ampli à partager la fameuse Poutine (conglomérat de frites, sauce, viande, un plat hyper diététique) devant le grand match de hockey du moment. GO. Premier break de 2 heures au bout de 6 jours de taf. Pintes méritées.
The place to be pour les petits frenchies que nous sommes.
Mais l’heure tourne, et le travail nous attend… un travail de nuit, repoussé de soir en soir en raison des conditions météo. Alors après quelques bières (pour certains) direction le vieux Québec, pour la scène dite de la « déambulation »: ça tombe bien, on croise de jeunes gars du coin qui nous tchachent sympa et nous questionnent sur le film, ils deviennent figurants et font les silhouettes très naturellement pour le film. Cool. Merci les cousins.
Minuit: on retrouve la voiture où nous attendent Robin et Céline (frigorifiés), on n’a pas fini le job, il nous reste une grosse scène à tourner avec notre fameux Guillaume… Mais c’est tard, l’heure a continué à avancer. Guillaume est rentré. Alors retour maison. Un peu tendus, il ne reste plus qu’un soir et il nous reste la scène principale du film à réaliser. La fatigue nous reprend tous soudain et le silence se fait sur le chemin qui nous mène à la maison. Ce sera la seule fois 😉 (les petits voyages quotidiens étant généralement sujets aux conversations les plus dé-bridées/biles) qu’il soit). On commence à penser que si ça continue, on devra reformuler certains fondamentaux du film… Il ne reste plus que demain pour bosser, une journée qu’on avait gardée comme journée de secours…et qui sera bien bien chargée.
Dimanche: the last day… Le matin, tournage des extérieurs@home. L’après-midi, retour au pub local pour un nouvel extérieur. Tout se passe bien et vite. Ouf.
L’après-midi, l’équipe « image » peut enfin tourner ses images d’illustrations, pendant que l’équipe « musique » se prend son tour de « cool » et part se baguenauder 2 heures dans le vieux Québec.
On se retrouve en fin de journée sous le château de Frontenac dans la plus vieille ruelle, celle du Trésor, le Montmartre Québécois, rencontre avec Patrick Colette, artiste contemporain et grand connaisseur de Québec, ancien parisien, ayant réalisé les décors de « La momie à mi-mots » . On échange nos contacts. Dans ma tête se formule de plus en plus l’idée de revenir présenter notre film ici quand il sera fait. 🙂
Le soir arrive, dernière Poutine. On mange dehors sous un grand parasol à l’abri de la pluie. Temps suspendu. Le patron de ce petit restaurant est très sympa, on discute des élections françaises, il nous remonte le moral.
Au fait, Robin nous a laissé ce matin pour faire un détour par New-York. Veinard.
Le soir, on peut enfin tourner la scène clé de notre moyen-métrage avec l’excellent Guillaume. Chapeau l’acteur. Casting réussi
Québec resplendit . L’esplanade est magique, c’est la dernière image qu’on emporte dans nos coeurs. The end. Feu d’artifice. Émotion d’avoir à quitter cet endroit si vite.
Dernier Clap -23 heures Dimanche
Lundi matin: Départ. Snif.
BUT WE DID IT !
Un nouveau job commence et non des moindres… mais les valises sont pleines 🙂
Alex (bien aidé par une violoniste 😉 )
See you soon!
Sortie 30 septembre 2017
Soirée Spéciale 10 ans Médiathèque / Festival Effervescence à Mâcon
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